Craquelé et joyeux. De Barbie à Helmut Newton, via Sandro Giordano


Aujourd'hui, l'offre culturelle est teintée de rose, le marketing ne cesse de faire appel au féminisme. Et l'art s'inscrit aussi dans ce sillage. La femme est au centre de tous les récits: comment faire face à cette... vague rose ?

L’art nous représente ou, autrement dit, nous choisissons l’art qui nous représente le plus. Et il ne s’agit pas seulement d’un incipit conforme à une campagne historique du ministère de la Culture qui disait #lartetisomiglia, mais il s’agit plus simplement de l’évolution de cet instinct de conservation qui a conduit nos ancêtres à peindre sur les parois des grottes pour laisser une trace de leur passage dans le monde et sur lequel (à partir de là) est né l’art tel que nous en parlons aujourd’hui.

En somme, si d’un côté nous nous efforçons de connaître l’art, celui qui est officiellement défini par quelqu’un, et de l’admirer dans les musées de manière plus ou moins convaincue, alors, dans le secret de nos goûts, nous choisissons par instinct et à la légère les représentations dans lesquelles nous trouvons une ressemblance avec l’image que nous avons de nous-mêmes. Ce peut être une attitude sociale qui nous pousse à nous regrouper et à nous homologuer, ou bien grâce aux neurones miroirs, qui expliquent physiologiquement notre capacité à nous reconnaître dans nos semblables, et à ressentir de l’empathie même lorsqu’ils représentent leur quotidien imparfait.

C’est à cela que j’attribue le succès de Remmidemmi, né Sandro Giordano, un photographe autodidacte qui dispose d’une galerie de 200 000 followers sur Instagram et d’une exposition en cours à la galerie Strati d’Arte à Rome sous le commissariat de Gina Ingrassia, intitulée In Extremis (corps sans regret). Ses portraits, patiemment construits en décors, racontent l’instant qui suit une chute, surréaliste, déflagrant. Un projet qui, depuis dix ans, se répète selon un format à chaque fois échoué et surprenant.

Sandro Giordano, Sans sucre s'il vous plaît Sandro Giordano
, Sans sucre s’il vous plaît
Sandro Giordano, beaux compliments pour l'exposition ! Sandro Giordano
, Bon spectacle, félicitations !
Sandro Giordano, Nous sommes aux fruits Sandro Giordano
, Nous sommes au fruit

Il y a quelque temps, il a raconté dans une interview: “C’était en septembre 2013, je participais à un spectacle et, sur scène, il y avait un escalier très imposant. L’une des actrices, alors que nous passions le temps avant les répétitions, m’a demandé de prendre une photo comique d’elle, et j’ai immédiatement visualisé son image au bas de l’escalier, tombée, le visage tourné vers le sol ; elle s’est mise dans cette position et là j’ai entrevu quelque chose, une intuition”. Le 12 octobre, de retour à Barcelone - où je vivais à l’époque - je me suis réveillé le matin, j’ai ouvert les yeux et j’ai pensé “je dois faire ça”".

Les protagonistes de ses images sont écrasés au sol, avec toute la charge de leurs objets, sortis d’un sac, tombés de la voiture, roulés dans les escaliers. Ce sont des instants figés d’une histoire que l’on peut retracer à rebours, en imaginant non seulement la chute, mais aussi la vie qui l’a précédée: le travail, un passe-temps, une soirée amusante, le début d’un voyage. Car la chute est un événement soudain au milieu d’un voyage.

Les chutes de Giordano sont décousues, irréelles, exagérées, jamais tragiques. Ce sont des images chargées d’ironie, soulignées par des objets surdimensionnés et des couleurs vives. On a presque l’impression que le “tombé” prend conscience de ce qui s’est passé, reprend des forces et, pourquoi pas, profite d’un moment de répit avant de se remettre en route. - profiter d’un moment de répit avant de se relever.

Pourtant, les sujets ne montrent jamais leur visage. Parce qu’après tout, il y a une part de pudeur chez ceux qui les racontent, mais aussi parce que - à mon avis - ce choix suggère que cet accident n’est souvent pas réel mais qu’il s’agit d’un sentiment que nous portons en nous, qu’il s’agisse d’une douleur prête à déflagrer, ou simplement de la conscience d’être confus et imparfait. Dans l’espace de l’exposition, il est évident que les sujets représentés sont principalement des femmes. Peut-être sommes-nous plus compliqués, à multiples facettes, ou plus simplement tellement accros à faire plusieurs choses à la fois, que nous sommes plus distraits, habitués à tomber et à nous relever.

"Plus que les couchers de soleil, plus que le vol d’un oiseau, ce qui est absolument merveilleux, c’est la renaissance d’une femme. Quand elle se remet debout après la catastrophe, après la chute.

Celle-là dit: c’est fini“, disait Jack Folla, le personnage écrit par Diego Cugia pour l’émission ”Alcatraz" de Radio 2, il y a maintenant vingt ans.

Et s’il ne s’agit pas d’une énième promotion qui s’adresse aux femmes, lorsque je fais mon choix parmi les offres culturelles à Rome ces jours-ci, je me rends compte que tout est teinté de rose. Dans un contexte où tout est féminisme, même l’art - au sens large du terme - se met à la page. Ainsi, la femme est désormais au centre de toutes les histoires, une présence involontaire dans tous les événements.

Helmut Newton, Ami. Milan, 1982 © Fondation Helmut Newton
Helmut Newton, Friend. Milan, 1982 © Fondation Helmut Newton
Helmut Newton, Rue Aubriot, Yves Saint Laurent, French Vogue. Paris, 1975 © Fondation Helmut Newton
Helmut Newton, Rue Aubriot, Yves Saint Laurent, French Vogue. Paris, 1975 © Fondation Helmut Newton
Helmut Newton, Nova. Paris, 1977 © Fondation Helmut Newton
Helmut Newton, Nova. Paris, 1977 © Fondation Helmut New
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Au cinéma, il y a toujours “Barbie”, qui représente les stéréotypes du féminisme d’aujourd’hui: des femmes accomplies et belles, des managers, des présidentes, des astronautes, ou des mères capables de traverser des mondes parallèles pour sauver leur famille, mais qui ressentent le poids d’attentes qui ne sont jamais pleinement satisfaites. “Il est littéralement impossible d’être une femme. Vous êtes si belle et si intelligente et cela vous tue de penser que vous n’êtes pas assez bien. Nous devons toujours être extraordinaires, mais d’une manière ou d’une autre, nous le faisons toujours mal”, déclare America Ferrera dans un monologue qui fait un clin d’œil aux Oscars. Un film qui s’est prêté à de nombreuses interprétations différentes, jusqu’à celle, subtilement conspiratrice, de Boris Jonson dans le Daily Mail du 23 juillet: “Quel est le message du film ? Que veut Mattel ? ... Elle veut plus de bébés qui deviendront bientôt des enfants qui demanderont des poupées. Mattel veut que les humains se reproduisent”.

Mais Helmut Newton est aussi vendu comme féministe, et son exposition “Legacy” à l’Ara Pacis à Rome jusqu’au 10 mars 2023 parle de femmes indépendantes, autonomes, résolues, séduisantes, dans un noir et blanc qui souligne la perfection de chaque courbe, et s’attarde sur chaque défaut. Ce sont des femmes qui conquièrent, qui dominent, qui attirent, et elles le sont en fonction de qui les regarde, que ce soit un personnage de l’image ou le regard du spectateur.

Une exposition riche et enveloppante avec ses grands tirages en format poster, que je recommande à tout amateur de photographie, mais aussi à tout amateur de beauté.

Bref, les femmes, si nous n’avons pas atteint l’égalité salariale (comme l’a rappelé celui qui a mentionné le prix Nobel décerné à l’économiste Claudia Goldin), nous pouvons au moins jouir de la liberté de choisir, parmi l’infinité d’expressions artistiques qui nous sont proposées, celle qui nous représente le plus.

J’ai choisi, et dans un décor aménagé pour le public, je n’ai pas pu m’empêcher de me proposer comme protagoniste d’une des photos de Giordano. Parce que je me reconnais dans ces femmes imparfaites et pleines de contradictions: une louche dans une main, un talon aiguille et des plumes d’autruche dans l’autre. Fêlées mais heureuses. Je repars avec un tirage 15x15 et une réflexion que je partage avec vous: une fois de plus, là où il n’y a pas de réponses, il y a l’art, qui nous taquine, nous fait réfléchir, déclenche des débats dans les journaux ou autour d’un apéritif, et au final nous laisse avec l’inestimable satisfaction d’avoir passé un bel après-midi.


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