Andrea Mantegna et Isabelle d'Este: le projet du monument à Virgile


Dans ce billet, nous retraçons l'histoire de la conception du monument à Virgile, conçu par Isabelle d'Este et confié à Andrea Mantegna. Nous sommes en 1499.

Credo deve essere cognito, saltem per fama, alla Ex. V. la condicione et summa virtù del Pontano, quale meritamente se po dire non soltanto alla età nostra, ma dapochi manto Virgilio, la natura humana non haa producto homo de magtrina né valuta de luy. Comme il m’est arrivé de m’entretenir longuement avec lui, après lui avoir rendu visite de la part du Consort de Votre Excellence, et après avoir rappelé la louable intention de Votre Excellence de faire faire une statue de Virgile, conformément à l’entretien que j’ai eu avec lui, il m’a semblé qu’il fallait le consulter auprès de Votre Excellence, en lui disant qu’il avait reçu de vous un tel ordre et une telle commande, et en lui faisant part du but qui a poussé votre esprit généreux à faire une telle œuvre. Ces lignes, que vous venez de lire, constituent le début de la lettre que Jacopo d’Atri, secrétaire des Gonzague et ambassadeur de Mantoue à Naples, écrivit à Isabelle d’Este (1474 - 1539) le 17 mars 1499. Dans cette missive, l’ambassadeur fait référence à une rencontre qu’il a eue avec Giovanni Pontano (1429 - 1503), un humaniste érudit, rhétoriquement considéré par Jacopo d’Atri comme l’homme “de magiore doctrina” depuis le “manchò Virgilio”, pour discuter d’une idée intéressante de la Marquise de Mantoue: la création d’une statue dédiée à Virgile, le grand poète de l’Antiquité, originaire de Pietole, les anciennes Andes, un village de la banlieue de Mantoue, aujourd’hui un hameau de la commune de Borgo Virgilio.

Une histoire dont les implications historiques ne sont pas entièrement documentées raconte qu’à Mantoue, sur la Piazza delle Erbe, il y avait un monument au poète, peut-être un buste, qui a cependant connu une mauvaise fin à la fin du XIVe siècle. C’était, pour être précis, le 31 août 1397: le chef de Rimini, Carlo Malatesta, allié aux Mantouans alors en guerre contre le duché de Milan, réussit à prendre le dessus sur l’armée des Visconti et entra triomphalement à Mantoue. Mais arrivé sur la Piazza delle Erbe, il aurait enlevé la statue de Virgile, officiellement parce qu’elle était considérée comme une idole païenne, mais les vraies raisons restent inconnues. Peut-être le chef, très pieux, était-il vraiment troublé qu’un poète de l’Antiquité soit encore tenu en si haute estime, ou peut-être s’agissait-il d’un geste de mépris envers la plèbe qui rendait toujours de grands honneurs au poète, allant même jusqu’à décorer la statue de couronnes de lauriers les jours de fête. Nous savons cependant que tous les grands intellectuels de l’époque, à commencer par Coluccio Salutati et Pier Paolo Vergerio, ont adressé des mots durs à la fureur iconoclaste de Carlo Malatesta, jugeant le geste hautement scandaleux et indigne d’un seigneur de sa trempe. Nous ne connaissons cependant pas le sort réel du monument: il semble avoir été jeté dans les eaux du Mincio, mais le débat historiographique sur les contours de l’événement a toujours été assez vif, sans qu’il soit possible d’arriver à une conclusion certaine.

Quoi qu’il en soit, Jacopo d’Atri, Giovanni Pontano et surtout Isabelle d’Este étaient d’accord sur le fait que Mantoue avait besoin d’un monument célébrant son fils le plus illustre. Et, selon les mots de Giovanni Pontano, Pier Paolo Vergerio aurait été ravi de savoir qu’une femme aussi jeune qu’Isabelle aurait été la protagoniste d’une œuvre aussi magnanime et élevée. En effet, il aurait été plus satisfait de l’esprit généreux d’Isabella qu’attristé par l’action honteuse du condottiero romagnol. Ainsi, la lettre contient également une discussion sur la manière de réaliser le nouveau monument: le matériau le plus approprié aurait été le marbre car, même si le bronze était plus noble (selon les convictions de Pontano), le bronze aurait couru le risque que les cloches, ou les bombardes, ne soient pas faites à partir de ce matériau. Bref, on craint une nouvelle destruction du monument. La statue, toujours selon la description de Jacopo d’Atri, aurait dû avoir un beau socle en dessous et être placée dans un endroit digne. Quant à la figure de Virgile, pour suivre le style de l’Antiquité, elle aurait dû être seule, avec le laurier sur la tête et le manteau de l’Antiquité, avec la toge et la ceinture sur l’épaule, ou avec la toge sénatoriale qui est la robe et le manteau par-dessus, et encore sans rien à la main, mais la statue simple sans livre ni rien d’autre en dessous, et encore avec les chaussures de l’Antiquité et quelques mots sous la base, à savoir P. Vergilius Mantuanus, et quelques mots, c’est-à-dire P. Vergilius Mantuanus, et la statue aurait dû être placée dans un endroit digne. Vergilius Mantuanus, et aussi “Isabella Marchionissa Mantuae restituit”, ou quelque chose de semblable.

Et qui aurait été l’artiste chargé d’exécuter le projet d’un monument d’une telle importance pour Mantoue et sa communauté? De toute évidence, l’artiste le plus exalté sur lequel les Gonzague pouvaient compter: Andrea Mantegna (1431 - 1506), qui, malgré son âge plutôt avancé (il avait soixante-huit ans en 1499), était encore tenu en grande estime non seulement par la cour des Gonzague (malgré quelques frictions mineures avec Isabelle elle-même), mais aussi par les humanistes napolitains. Étant donné la passion et la sensibilité d’Andrea Mantegna pour l’antiquité classique, il n’y avait pas d’artiste plus approprié pour une telle entreprise. Cependant, nous ne savons pas grand-chose de ce projet: outre la lettre de Jacopo d’Atri, le seul autre témoignage direct est la réponse d’Isabelle d’Este, qui exprime son appréciation pour les paroles de Pontano. Il reste cependant quelques dessins qui peuvent être attribués à l’entreprise: l’un d’eux, en très mauvais état, est conservé au Gabinetto dei Disegni e delle Stampe degli Uffizi (numéro d’inventaire 1672 F). L’historien de l’art David Ekserdijan est le premier à émettre l’hypothèse que le dessin a été réalisé dans le cadre du projet: cependant, l’état dans lequel il se trouve ne permet pas de formuler une hypothèse solide. Par exemple, l’attribut de la couronne de laurier manque (ou, s’il y en a un, il ne serait plus lisible), et il y a manifestement un manque de documents permettant d’établir quand le dessin a été réalisé.

Il existe ensuite, au Louvre, un dessin, mieux conservé que celui des Offices mais d’une finesse exécutive moindre, et donc probablement l’œuvre d’une école, qui représente un hypothétique monument à Virgile représenté plus ou moins comme dans la description de la lettre de Jacopo d’Atri: il s’agit d’une figure digne et sévère, vêtue d’une robe sénatoriale et couronnée de lauriers. Par rapport à la lettre, cependant, le Virgile de Mantegna tient un livre à la main, symbole de sa poésie, et l’inscription sur la base, décorée de putti rappelant le classicisme et de festons typiques de l’art de Mantegna, diffère légèrement de celle proposée par Pontano. Bien que les caractéristiques de l’œuvre soient dures et fortes, typiques d’Andrea Mantegna, il est très probable qu’il ne s’agisse pas d’un autographe, notamment parce que le dessin a été ostensiblement retravaillé, ce qui compromet les évaluations: aujourd’hui, on a donc tendance à le considérer comme l’œuvre de son entourage.

Le projet n’a cependant jamais vu le jour: peut-être Isabelle d’Este était-elle préoccupée par trop de pensées et de projets (en 1499, Léonard de Vinci arriva d’ailleurs à Mantoue) et Mantegna, vu son âge avancé, ne voulait ni ne pouvait se permettre de traîner longtemps derrière lui une œuvre aussi exigeante, sur laquelle il y avait beaucoup d’inconnues. L’artiste mourra sept ans plus tard, en 1506, et avec lui disparaîtra le rêve de rendre à Mantoue un monument à son Virgile. La ville qui avait toujours aimé le poète dut attendre le XIXe siècle pour voir Virgile honoré d’une grande statue: mais ceci est une autre histoire.

Cerchia di Andrea Mantegna, Monumento a Virgilio
Cerchia di Andrea Mantegna, Monument à Virgile (dessin ; vers 1499 ; Paris, Louvre, Cabinet des dessins ; inv. RF 439)


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