Caravage à Rome, une exposition de haut niveau à Paris avec une comparaison entre les deux Madeleine


Bilan de l'exposition 'Caravage à Rome' à Paris, Musée Jacquemart-André, du 21 septembre 2018 au 28 janvier 2019.

Nousrecevons et publions la critique suivante de l’exposition Caravage à Rome qui se tient actuellement au Musée Jacquemart-Andr&eacute à Paris.

Dans son essence, une exposition de haut niveau. Voilà ce que l’on peut dire en quelques mots de Caravage à Rome, dont les commissaires sont Francesca Cappelletti et Pierre Curie, même si le sous-titre(Amis et ennemis), qui rappelle quelque chose de déjà entendu, indique implicitement qu’il ne faut pas s’attendre à de la nouveauté à tout prix, en termes d’acquisitions sur le plan scientifique. L’exposition, en effet et avant tout, trouve précisément l’une de ses raisons d’être à Paris, qui n’avait pas accueilli de manifestation d’un objet comparable depuis 1965. C’était une autre époque: au Louvre, Caravage et la peinture italienne duXVIIe siècle pouvait faire découvrir des chefs-d’œuvre du Caravage (Milan, 1571 - Porto Ercole, 1610) désormais aussi inamovibles que les tableaux de la chapelle Contarelli ; et même la Nativité de Palerme, hélas emportée quelques années plus tard.

Cette fois-ci, le musée Jacquemart-André est moins connu du grand public et quelque peu inattendu: la période des XVIe et XVIIe siècles est moins représentée dans les collections (un “vide” que l’exposition peut en quelque sorte combler). Mais cela importe peu, si ce n’est que les espaces d’exposition sont exigus et que cela se répercute, plus que sur la réalisation, sur le nombre limité d’œuvres par salle: certaines sections sont cependant représentées, et toujours de manière efficace, même par quelques tableaux. En outre, la volonté du Jacquemart-André de devenir un lieu d’accueil pour la manifestation a été récompensée par trois prêts importants (deux Caravaggio et un Baglione) du Palazzo Barberini, qui, parallèlement à six œuvres du musée parisien, ont constitué l’exposition La stanza di Mantegna.

Mais pour en revenir au Caravage à Rome, il a la particularité d’être développé par thèmes, pas moins de huit: Le théâtre des têtes coupées; Musique et nature morte; Peinture avec le modèle devant; Contemporains; Images de méditation; Visages de Rome au début du XVIIe siècle; La Passion du Christ, un thème caravagesque; L’évasion. Cela nous donne néanmoins l’occasion d’aborder les questions de chronologie (peut-être le critère de présentation le plus communément adopté), en commençant par la “pièce” d’ouverture. À l’instar du Dentro Caravaggio milanais (et, à certains égards, en contraste avec lui), Judith et Holopherne du Palazzo Barberini fait bonne figure dans la première salle. L’œuvre est ici reproposée aux alentours de 1600, ce qui modifie légèrement la datation traditionnelle qui l’aurait placée un peu plus tôt, mais à Milan, elle a été attribuée à 1602 selon un document qui a maintenant été réexaminé plus attentivement (un aspect qui n’est toutefois pas abordé dans le catalogue).

Caravage, Judith et Holopherne
Caravage, Judith et Holopherne (1602 ; huile sur toile, 145 x 195 cm ; Rome, Gallerie Nazionali d’Arte Antica di Roma, Palazzo Barberini)

Mais au-delà, c’est un passionnant parcours historico-artistique qui commence et se déroule à partir de ce prêt exceptionnel, parmi des chefs-d’œuvre plus ou moins connus et vus. Parmi ces derniers, il convient de mentionner le magnifique Saint Jean-Baptiste de Bartolomeo Manfredi (Ostiano, 1582 - Rome, 1622) provenant du Louvre. Toujours dans le même musée, intéressante plus pour des raisons historiques que pour l’objet lui-même, l’esquisse monochrome de Giovanni Baglione (Rome, 1566/1568 - 1643) de la Résurrection du Christ de l’église du Gesù, perdue (à l’exception de deux morceaux qui subsistent). Cette dernière œuvre a déclenché une rivalité sans précédent entre le peintre romain et Merisi, un aspect biographique (et autre) pertinent dans le contexte plus général des relations entre les artistes de l’époque, avec la présence singulière du “maître sans élèves” Michelangelo Merisi.

L’un des points forts de l’exposition est la juxtaposition bien documentée et riche en valeurs de certaines œuvres. Comme celle entre le Baptiste de Baglione et le sujet similaire du Caravage dans la version du Capitole. Ou encore entre le Saint Laurent de Caravage par Cecco et le Saint François en méditation de Crémone par Merisi. Toujours par ce dernier, l’Ecce Homo à Gênes près du même sujet peint par Ludovico Cardi dit il Cigoli rappelle une anecdote qui aurait vu une dispute entre les deux artistes.

Bartolomeo Manfredi, Saint Jean-Baptiste (1613-1615 ; huile sur toile, 148 x 114 cm ; Paris, Louvre). Photo de René-Gabriel Ojéda
Bartolomeo Manfredi, Saint Jean-Baptiste (1613-1615 ; huile sur toile, 148 x 114 cm ; Paris, Louvre). Photo de René-Gabriel Ojéda
Caravage, Saint Jean-Baptiste (1602 ; huile sur toile, 129 x 94 cm ; Rome, Musées du Capitole, Pinacothèque Capitoline)
Caravage, Saint Jean-Baptiste (1602 ; huile sur toile, 129 x 94 cm ; Rome, Musées du Capitole, Pinacothèque Capitoline)


Giovanni Baglione, La Résurrection du Christ (1601-1603 ; huile sur toile, 86 x 57 cm ; Paris, Louvre)
Giovanni Baglione, La Résurrection du Christ (1601-1603 ; huile sur toile, 86 x 57 cm ; Paris, Louvre)

Mais surtout, la comparaison qui vaut à elle seule le détour est celle entre les deux Madeleine en extase débattues: la version déjà connue de la collection Klain, et celle reconnue en 2014 par Mina Gregori chez un marchand privé hollandais. Deux textes picturaux sur lesquels l’œil du connaisseur s’exerce enfin ensemble (jusqu’à présent, hors de sa voûte suisse, la nouvelle toile n’a été vue qu’à Tokyo). Le débat critique est ouvert, d’autant plus que, individuellement, le catalogue ne prend pratiquement pas position, même si l’exposition crédite d’une manière ou d’une autre les deux éditeurs (et que, par conséquent, le nombre de tableaux de Caravage présents atteint le chiffre rond remarquable de vingt). Jusqu’à présent, très peu de chercheurs se sont opposés à l’hypothèse attributive de Gregori. Et le fait qu’il n’existe aucune reproduction d’une étiquette ancienne qui attribuerait la toile à Merisi, précisant en quelques lignes, outre l’auteur, le sujet, la localisation coïncidente et le destinataire final (nom et ville), n’est pas d’un grand secours face à ces hésitations.

Cette exhaustivité inattendue des informations avait déjà éveillé des soupçons quant à l’authenticité du document. A cette considération, nous voudrions ajouter ici l’observation qu’un tel crâne (en termes de coloration, si du moins une “plaisanterie” est permise, plus proche d’un bouton de laiton !) semble étranger à la production de Merisi (si tant est qu’il y en ait eu une). Quoi qu’il en soit, pour en revenir à la chronologie, 1606 est proposé de manière douteuse pour cette œuvre, bien que la date de 1610, récemment proposée, soit mentionnée. Ce n’est pas une mince affaire si l’on considère que l’exposition est consacrée aux années romaines du Caravage. En même temps, le découpage chronologique adopté (qui, pour Caravage, mais pas pour ses suiveurs, s’arrête à 1606, année où il quitte définitivement la Ville éternelle) justifie l’absence d’œuvres telles que Saint Jean-Baptiste Borghèse et Sainte Ursule, toutes deux de 1610, qui auraient certainement été les plus pertinentes pour confirmer (ou infirmer) une date plus tardive pour Madeleine.

Caravaggio, Madeleine en extase connue sous le nom de
Caravage, Madeleine en extase dite Madeleine Klain (après 1606 ; huile sur toile, 106,5 x 91 cm ; Rome, collection privée)


Caravage, Madeleine en extase (après 1606 ; huile sur toile, 103,5 x 91,5 cm ; Pays-Bas, collection privée)
Caravage, Madeleine en ext ase (après 1606 ; huile sur toile, 103,5 x 91,5 cm ; Pays-Bas, collection privée)

Il est enfin appréciable qu’à l’encontre des logiques mouvementistes souvent peu scrupuleuses qui affectent les expositions, les trois Caravage du Louvre y soient restés (après tout, aucun d’entre eux n’a été absent de la Grande Galerie au cours des 20 dernières années). Ceux qui souhaitent les voir peuvent toujours se rendre au musée qui les conserve, ce qui constitue une raison supplémentaire et toujours valable de visiter la ville (et d’autant plus pour les visiteurs de Caravage à Rome), qui accueille en ce moment un nombre exceptionnel d’œuvres de Merisi.

Il convient également de mentionner la conférence Caravaggio. Una vita barocca, un événement parallèle qui s’est tenu le 9 janvier et qui a permis d’illustrer pour la première fois les recherches scientifiques effectuées sur la Madeleine “Gregori” et de les comparer avec celles effectuées sur l’autre version. Enfin, les visiteurs qui se rendront au Jacquemart-André d’ici au 28 janvier trouveront le Joueur de luth de l’Ermitage, présenté pour la première fois au public après une longue restauration.


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