Quel sens cela a-t-il aujourd’hui de parler de critique d’art dans un monde où tout le monde peut exprimer une opinion, mais où les vrais débats sont de plus en plus rares ? À l’ère de l’infosphère, des médias sociaux et de la prétendue démocratisation culturelle, le jugement semble avoir pris la place de la pensée critique, tandis que le public s’est transformé en une audience nombreuse mais souvent passive. Dans ce contexte, le rôle du critique et du commissaire d’exposition peut-il encore être celui de l’autorité qui impose un canon ou dicte une direction, ou doit-il au contraire devenir un espace de médiation, d’écoute et de construction partagée du sens ? Comment la figure du critique a-t-elle changé à l’ère de la montée en puissance du conservateur comme interprète du présent, avec la crise des institutions culturelles et l’impact des technologies numériques sur la perception du temps et de l’art ? Dans cet entretien avec Gabriele Landi, le critique et conservateur Lorenzo Bruni, directeur de The Others Art Fair, aborde cette question dans une conversation où Bruni repense radicalement les fonctions de la critique contemporaine. Il en ressort une vision dans laquelle le commissariat devient une pratique située, l’art un instrument de prise de conscience et l’empathie un levier critique pour habiter, avec responsabilité, la complexité du présent.
GL. Lorenzo, quel est, selon vous, le rôle du critique d’art aujourd’hui ?
LB. C’est une question piège, une sorte de boîte à mystère. Pour y répondre, il faut d’abord se demander ce que l’on entend par “critique” à l’heure de l’hypothétique démocratisation de l’information. La question à se poser est la suivante : le critique doit-il porter un jugement sur l’œuvre ou proposer une méthode de lecture ? Une question qui entraîne celle de savoir qui a le droit/le devoir d’exercer ce rôle. La question elle-même implique un système de valeurs qui appartient au siècle dernier, alors qu’aujourd’hui nous vivons dans un contexte où les hiérarchies culturelles ont heureusement été démantelées - du moins en apparence - par l’accès horizontal à l’information que permettent les réseaux sociaux et la numérisation de la réalité. Mais cette démocratisation, alimentée (mais non créée) par les nouvelles technologies, a produit un paradoxe : plus d’opinions, moins de débats, plus de jugements. A partir du moment où tout le monde est expert et où tout le monde exerce une critique intuitive, plus personne n’écoute et tout devient relatif. Ainsi, en l’absence d’une pensée critique “partagée”, c’est le marché (au lieu d’être le reflet d’un système) qui dicte ce qui “marche”.
... Parlez-vous de la crise de la critique ?
Non, je parle de la crise du rôle du public actif. En fait, la “crise de la critique” est un mantra qui a été ressorti à chaque décennie depuis la Seconde Guerre mondiale, souvent pour éviter de redéfinir réellement le rôle du critique par rapport aux besoins changeants de la société et de l’art lui-même. Au mieux, elle n’a fait que polariser la question entre ceux qui voulaient un débat entre spécialistes et experts et ceux qui visaient, au contraire, une vulgarisation qui investirait davantage de couches de la population civilisée. En effet, la figure du critique - qui a évolué de Clement Greenberg à Harald Szeemann et Germano Celant, de Filippo Menna à Achille Bonito Oliva - a progressivement cédé la place, dans les années 1990, à celle du conservateur. De Hans Ulrich Obrist à Francesco Bonami, de Hou Hanru à Carolyn Christov-Bakargiev, le commissaire est devenu au cours de cette décennie l’interprète privilégié des nouvelles urgences artistiques dans un monde global, hypercommunicatif et post-idéologique. Son instrument n’est plus le texte ou le livre mais l’exposition thématique, dont le modèle, depuis 1992, semble s’incarner dans le cas international de Post-human (commissariat du galeriste et marchand Jeffrey Deitch) puis, à partir de 1997, dans celui de Cities on the Move (commissariat de Hans Ulrich Obrist et Hou Hanru). En d’autres termes, une exposition qui n’a plus à présenter une vision unique de l’art et qui permet donc la coexistence d’artistes de nationalités, d’horizons culturels, d’idéologies esthétiques et même de générations différentes, ainsi que l’utilisation de techniques différentes. Le commissaire, après le début des années 2000, n’est plus une figure à accepter, mais est reconnu comme un rouage indispensable d’un système international, précisément parce que les publics s’élargissent. C’est ainsi que tant d’opportunités événementielles se présentent en peu de temps : des nouvelles biennales en Asie et dans le Sud aux nouveaux musées. Il est important de noter que cette variété d’offres ne s’est pas accompagnée d’une réelle participation du public. Toutefois, nous ne nous en rendons compte que maintenant, et la cause en est peut-être l’excès de performativité dans lequel le conservateur et le musée se sont aventurés afin de répondre au besoin du marché d’attirer un public de plus en plus nombreux. Des publics qui, par conséquent, devaient être passifs pour se transformer en chiffres records à brandir comme un trophée pour attirer de nouveaux financements.
Pensez-vous que la figure du commissaire soit encore influente aujourd’hui ?
À partir de 2012, dans le nouveau contexte de l’économie du partage et de l’Internet 2.0, la figure du curateur/directeur a dû apparaître aux nouvelles générations comme trop passive et désormais intégrée aux institutions et au marché, ce qui a conduit, lentement mais sûrement, à l’émergence de nouvelles figures telles que les créateurs de contenu (et pas seulement les influenceurs) qui pouvaient atteindre tout le monde sur les réseaux sociaux. Dans ce contexte, l’idée de refonder la figure du critique d’art apparaissait peut-être grotesque, tout comme il semblait impossible de repenser celle du journaliste qui était auparavant celui qui dispensait l’information. Les nouvelles générations de professionnels du monde du journalisme ont répondu à tout cela en fondant de nouvelles manières d’enquêter et de réfléchir sur les mécanismes de lecture de l’information afin de ne pas la subir passivement puisque, dans le contexte numérique, elle est capillaire et en direct. C’est ainsi que sont nées des réalités comme Will, Il Post, des professionnels comme Cecilia Sala, Francesco Costa ou Daniele Raineri , etaprès des expériences comme Rivista studio et Lucy et d’autres projets destinés à soustraire le lecteur à la dictature de l’algorithme. De la même manière, le défi du critique d’art n’est pas d’inventer et d’imposer un canon, ni de retourner à la cathèdre, mais plutôt d’offrir un espace qui ouvre un vrai débat - pas seulement au niveau de la communication fraîche pour attirer le public - pour créer un antidote même, dans le contexte de l’infosphère, à l’apathie informationnelle et à la relativisation du jugement.
Dans quelle direction allez-vous ?
Dans une direction qui n’est certainement pas linéaire, peut-être en cercle, à la recherche de pratiques et de personnes capables d’activer des stratégies alternatives, capables de générer des systèmes d’action partagés à partir de la base, plutôt que des théories imposées ou à imposer d’en haut. J’ai toujours essayé d’adopter le rôle d’un interprète qui ne juge pas de l’extérieur, mais de l’intérieur. C’est-à-dire en travaillant en contact direct avec les artistes eux-mêmes, une voie déjà pratiquée en son temps par Szeemann, Lucy Lippard, Celant, Pier Luigi Tazzi et bien d’autres. C’est cet esprit qui m’a guidé au cours des cinq dernières années en tant que directeur artistique de The Others Art Fair à Turin.
Parlez-moi de votre expérience en tant que directeur de The Others.
L’expérience de The Others m’a amené à me confronter au territoire complexe - et inévitablement ambigu - du marché de l’art, en essayant de ne pas être soumis à sa logique, mais de la questionner de manière critique. Le point de départ a été de poser une question simple mais radicale aux exposants qui souhaitaient participer : que signifie être indépendant aujourd’hui ? Dans un système global où tout est connecté, où les opinions se multiplient à travers les médias sociaux, les algorithmes et des canaux de plus en plus horizontaux, il ne suffit plus de se dire “autre” pour être réellement alternatif. Aussi parce que le système - qu’on le veuille ou non - nous l’habitons tous. C’est pourquoi The Others, à partir de 2019 - la première année où je la dirige - , ne s’est pas seulement transformée en une foire satellite ou alternative, mais plutôt en une plateforme de comparaison, où les galeries historiques et les espaces émergents, les espaces gérés par des artistes, les galeries à domicile et les réalités à but non lucratif coexistent sans hiérarchie, parce qu’il n’y a pas de sections qui les différencient. Ce que le public trouve dans le parcours de l’exposition est un dialogue entre des thèmes et des réflexions similaires, car ce qui est présenté n’est pas le pedigree de la galerie, mais plutôt sa manière cohérente de travailler à travers ce projet et ces œuvres conçues pour l’occasion. Ce dernier aspect, permis par la nature nomade de la foire, qui change constamment de lieu et réactive des espaces normalement inaccessibles, invite à un dialogue spécifique au site. Ces dernières années, nous nous sommes beaucoup interrogés dans ce sens avec les différents curateurs qui ont participé au Conseil afin de réfléchir au rôle de la médiation culturelle à l’heure du langage des influenceurs et de l’opinion généralisée.
Comment cette vision que vous avez de la pratique d’un commissariat participatif avec les galeries et les artistes impliqués s’applique-t-elle au commissariat d’expositions ?
J’essaie toujours de pratiquer un échange délibéré entre la mise en évidence de l’intention de l’artiste et la contextualisation de sa signification dans un nouveau système critique. C’est ainsi que je comprends et que j’ai toujours compris mon rôle de commissaire-critique : en tant que créateur de liens et de contextes dans lesquels l’interprétation peut émerger en tant que processus collectif. C’est encore une constante dans mes expositions aujourd’hui, mais c’est aussi une caractéristique de mes premiers projets - de l’exposition sur l’Albanie avec Adrian Paci et Sislej Xhafa en 2001 à la Fondazione Lanfranco Baldi (présidée par Pier Luigi Tazzi) à la collaboration que j’ai entamée en 2000 avec le collectif de l’espace à but non lucratif Base / Progetti per l’Arte à Florence - avec lesquels j’ai essayé d’activer des pratiques capables de remettre en question l’autorité du conservateur et le rôle même de l’exposition. Par conséquent, cette dernière n’a jamais été pour moi un point d’arrivée pour affirmer une vision de l’art, mais plutôt un point de départ. C’est pourquoi mes expositions, en plus de présenter les recherches les plus intéressantes du moment, se sont toujours attachées à faire émerger un nouveau système d’interprétation possible qui permette non seulement de prédire les tendances futures, mais aussi de redécouvrir des aspects inédits d’artistes du passé.
Pouvez-vous me donner quelques exemples ?
La recherche d’une combinaison entre le rôle du commissaire (proposer l’artiste intéressant à un moment précis) et celui du critique (insérer l’œuvre d’un artiste dans un discours plus large lié à l’histoire de l’art) ne doit pas nécessairement être théorisée, mais seulement pratiquée. C’est ce qui ressort immédiatement du cycle d’expositions que j’ai conçu et organisé de 2005 à 2010 à l’espace Via Nuova Arte Contemporanea de Florence, impliquant des artistes de renommée internationale, de Martin Creed à Nedko Solakov, de Roman Ondak à Mai Thu-Perret, de Carsten Nicolai à Mark Manders, de Rossella Biscotti à Ian Kiaer, de Paolo Parisi à Dmitry Gutov, de Christian Jankowski à Koo Jeong-A. Les regroupements individuels ont permis de créer différentes tensions liées à l’histoire de l’art. Les regroupements individuels ont permis de faire émerger différentes tensions liées au présent (du concept de paysage en pleine mutation à celui de héros, de celui d’abstraction au concept de perte de mémoire collective), mais en encadrant le tout dans une réflexion commune plus large qui consistait à réfléchir à la manière de gérer et de traiter l’héritage du modernisme. En effet, ce sont les années où les nouvelles archives numériques et la longue vague de mondialisation post-idéolgique ont amené les artistes à réfléchir non plus sur l’histoire avec un grand S, mais sur l’apport de la réactivation de la mémoire. Cette mémoire à retrouver qui pourrait enfin donner corps à de nouvelles perspectives d’observation des faits, mais aussi donner la parole à ceux qui jusqu’alors ne l’avaient pas eue parce qu’elle avait été absorbée dans celle des canaux officiels. C’est dans cet équilibre entre immersion et distance, entre complicité et analyse, entre commissariat et théorie que se développe ma recherche. C’est une méthode que j’ai également étendue à des projets plus institutionnels, comme ce fut le cas avec l’exposition de 2013 au centre d’art de Klaipeda sur le thème du voyage ou dans le cycle d’expositions personnelles dont je suis le commissaire depuis 2018 au Museo Novecento de Florence, sous la direction de Sergio Risaliti, qui m’a amené à impliquer des artistes tels que Ulla von Brandenburg, Jose Davila, Wang Yuyang et Mcarthur Binion .
Avec vos expositions et vos projets, vous avez donc cherché à combiner une perspective historique et une attention au présent. Est-ce bien le cas ?
Oui. J’ai essayé de développer une approche curatoriale à la fois analytique et située, capable de passer de l’observation structurelle à l’intervention contextuelle. Cela a conduit mon travail à se décliner sur différents plans : entre le local et le global, entre l’archive et la chronique, entre l’institution et l’indépendance : dans et hors des musées, dans les festivals, dans les espaces autogérés, dans les contextes éducatifs et sur les plateformes numériques. Mais ce qui a été le plus important pour moi, c’est d’essayer de dépasser l’idée héroïque du conservateur en tant qu’auteur unique, pour assumer au contraire un rôle de suture entre les générations, les langues et les mémoires submergées.
Pourriez-vous définir ce besoin de faire dialoguer les nouvelles tendances avec l’histoire comme une caractéristique stylistique de votre travail ?
L’idée de lire le présent dans une clé historique nouvelle et sans précédent n’était pas quelque chose qui m’appartenait en propre, sinon elle n’aurait pas été un outil critique. À ce moment de l’histoire - le milieu des années 2000 - nous pouvions déjà percevoir des signes clairs d’une transformation en cours : une demande commune du public et des artistes pour une nouvelle approche et une manière différente de comprendre la relation entre l’art, la société et l’histoire. L’idée de l’histoire telle que nous l’avions connue au XXe siècle était épuisée - la thèse élaborée en 1989 par le politologue américain Francis Fukuyama a trouvé sa déclinaison la plus concrète dans ces mêmes années - et il devenait nécessaire d’identifier de nouvelles perspectives et pratiques capables de la réinterpréter de manière critique. Cette évidence s’est imposée à tous depuis la Biennale de Venise de Daniel Birnbaum en 2009. Ainsi, depuis les années 2010, les réflexions sur le modernisme, la mémoire et les généalogies invisibles ont progressivement redéfini le champ curatorial, au point de faire de la mémoire un outil et un support de recherche plutôt qu’un thème. Le problème est apparu dans les années suivantes, lorsque tout le monde a commencé à ouvrir ses tiroirs, quelle qu’en soit la raison, faisant de l’activation de la mémoire une catégorie esthétique plutôt qu’une urgence éthique. Dans le même temps, une nouvelle tendance a émergé - à partir de 2012 avec la documenta(13) de Carolyn Christov-Bakargiev - caractérisée par une approche “archéologique” : non plus tournée vers le passé, mais capable d’ausculter le présent dans sa complexité stratifiée. D’autre part, c’est dès 2005 que les biennales d’art ne sont plus seulement des lieux qui doivent proposer les tendances du présent, mais cherchent à proposer une nouvelle lecture du passé récent, un peu comme si elles devaient se faire passer pour un musée contemporain idéal. Cela a conduit aux cas extrêmes des Biennales de Massimiliano Gioni, qui ont inclus des artistes outsiders, des Biennales de Christine Macel, qui ont cherché à proposer des artistes en dehors du marché, ou des Biennales de Cecilia Alemani, qui ont mis l’accent sur des artistes longtemps restés en marge. Elles ont en commun d’avoir voulu remettre en cause les canons du récit dominant en proposant aussi une interprétation qui répare les erreurs de l’histoire du XXe siècle. Parallèlement, d’autres modes se sont attachés à repenser le rôle de l’exposition thématique, comme ce fut le cas avec la Biennale de Berlin 2016 sur le post-internet et Manifesta à Zurich sur le concept de travail. Ces deux événements ont été organisés par des artistes, le premier par le collectif DIS et le second par Christian Jankowski. Les exemples seraient nombreux, cependant, et tous nous rappellent que le commissariat d’exposition ne peut plus être un exercice d’imposition d’une autorité. Il doit se faire espace d’alliances, de confrontations, de questions. Il doit habiter les interstices entre les artistes, les publics, les formats et les langues.
Sur quoi un conservateur doit-il se concentrer aujourd’hui ?
Je pense qu’il devrait se concentrer - comme les nouvelles générations en ressentent le besoin - sur la rédaction de bons textes et aider l’artiste non seulement à créer les conditions pour réaliser son travail de la meilleure façon possible, mais aussi à pouvoir exprimer librement ses pensées sur ce monde qui change rapidement. C’est une voie qui conduit évidemment à actualiser le concept de site spécifique, qui était central dans les années 1990, par celui de temps spécifique. C’est la seule réaction possible au fait que nous vivons à une époque marquée par les algorithmes et l’accélération perceptuelle constante, ce que Claire Bishop a appelé le “syndrome du présentisme”. Dans ce contexte, il deviendra de plus en plus essentiel de réfléchir à des formats d’exposition qui tiennent compte non seulement du lieu, mais aussi du temps : le temps du processus, de la réalisation, de l’exposition, du contexte. C’est une perspective qui permet d’échapper à la logique de l’œuvre comme geste isolé et autoréférentiel.
Des œuvres spécifiques au temps ? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?
Il s’agit de créer une approche qui prenne en compte le temps dans lequel nous sommes et le temps de la réalisation, et pas seulement la manière dont les œuvres s’intègrent dans l’espace physique. C’est ce que j’ai essayé de faire en 2018 au Museo Gemellaro de Palerme pour l’événement collatéral Manifesta, où j’ai fait dialoguer des artefacts appartenant à différentes époques géologiques avec des œuvres de Marinus Boezem, Maurizio Nannucci, Antonio Muntadas, Paolo Parisi, Domenico Mangano, Salvatore Arancio, Gianni Melotti. Des œuvres/interventions - avec des techniques disparates telles que le néon, les dessins, la céramique, les peintures, les vidéos, les sculptures - qui nous ont fait réfléchir sur les paramètres avec lesquels nous réfléchissons au passage du temps, à sa perception, mais aussi au temps du processus de l’œuvre pour exister en dialogue avec le temps pris par le spectateur pour s’y rapporter. Un aspect qui m’a amené à explorer, pour une exposition également en 2018 à la Galleria Poggiali à Florence, comment des artistes célèbres pour leur travail sur la vidéo tels que Grazia Toderi, Park Chang-Kyong et Slater Bradley comprenaient la perception du temps lorsqu’ils utilisaient d’autres médiums que la vidéo : un médium qui, par sa nature même, se développe au fil du temps et est fait de temps. Une attitude qui doit bien sûr prendre en compte les nouvelles mutations sociales et les différents débats sur le sujet qui se sont multipliés depuis. Ainsi, depuis 2020, je me suis retrouvée à questionner la spécificité du temps à travers des conversations avec différents curateurs tels que Giacinto di Pietrantonio, Angela Vettese, Stefano Chiodi, Giorgio Verzotti, Andrea Cortellessa, Adelina von Fürstenberg, Jens Hoffmann et Charles Esche. Conversations publiées dans les catalogues produits par la Galleria Frediano Farsetti à l’occasion d’un cycle de trois expositions portant sur des thèmes différents. Dans la dernière exposition, celle de Gerwald Rochenshaub, Riccardo Guarneri et Jose Guerrero, par exemple, en réunissant trois générations différentes, ainsi que trois méthodes de travail différentes - telles que la peinture abstraite/analytique, l’objet moderniste et la photographie - nous avons étudié l’utilisation de codes abstraits comme moyen de réagir au flux d’images numériques que nous contribuons nous-mêmes à produire. Ce thème était également au cœur de l’exposition personnelle de Paolo Parisi que j’ai organisée à Building à Milan en 2021 et qui nous a permis de relire ses œuvres de différentes années, comme des peintures abstraites pixellisées de 2015 avec des œuvres des années 1990.
À vos activités de directeur de foire et de commissaire d’expositions dans des espaces alternatifs, mais aussi dans des musées institutionnels, il faut cependant ajouter votre rôle de professeur.
Oui, c’est vrai. Ces dernières années, j’ai étendu ma pratique consistant à essayer de combiner l’investigation sur le terrain avec une vision de théoricien à ma pratique d’enseignement des cultures numériques dans diverses académies et écoles polytechniques italiennes. Le choix a été facile étant donné que, précisément dans le domaine des cultures numériques, du graphisme à l’heure du numérique, de l’esthétique du “gaming” et de la vidéo à l’heure de l’algorithme, il n’existe pas de manuels de référence, car ce sont des histoires que nous sommes encore en train d’écrire. C’est pourquoi tous mes cours ne sont pas traversés par une lecture aprioriste des phénomènes du présent pour relire le passé, mais plutôt par une question pour ouvrir un débat : quel est aujourd’hui et quel sera le rôle de l’imagination et de la créativité à l’ère du ChatGPT, des archives numériques et de la censure obtenue non pas par la suppression de l’information mais par sa surabondance ? C’est une question à laquelle nous devons répondre avec les nouvelles générations, justement pour éviter d’enseigner avec des outils théoriques aujourd’hui obsolètes.
Dans le “paysage” artistique actuel, en 2025/2026, qu’est-ce qui vous attire le plus ?
A ce moment de l’histoire, je suis intéressé par une nouvelle génération d’artistes qui vont et travaillent sur l’empathie, mais pas dans un sens sentimental, mais plutôt comme la capacité de nous faire “entrer dans la peau de l’autre”. Un art capable de défaire le solipsisme contemporain actuel, développé peut-être aussi en réaction à l’hyperconnexion généralisée et à l’accessibilité totale apparente garantie par les réseaux sociaux. Je fais référence aux pratiques qui abordent le changement cognitif introduit par les technologies immersives qui, au lieu de favoriser la connexion, simulent souvent l’implication, nous laissant spectateurs passifs. Aujourd’hui, nous nous contentons de clamer haut et fort que nous sommes à l’ère du sujet interactif, mais ce n’est pas le cas, ou du moins ce n’est qu’à des fins commerciales. Ces dernières années, nous avons entrevu des aperçus de la critique de cette situation, et je pense à Real Violence de Jordan Wolfson, présentée à la Biennale du Whitney en 2017 : une expérience de spectateur VR dans laquelle le spectateur assiste impuissant - comme lorsqu’il profite d’autres images en ligne sur ses appareils électroniques - à une attaque brutale dans la rue par l’artiste lui-même, transformé en poupée animatronique, avec le marmonnement d’une prière juive en arrière-plan, qui amplifie l’éloignement. Je pense aussi à In View of Pariser Platz de Jon Rafman, dans laquelle le visiteur de la Biennale de Berlin 2016 (toujours à l’aide d’une visière VR) était immergé dans une version améliorée et scintillante du panorama vu depuis la terrasse surplombant la Porte de Brandebourg, puis se voyait tomber au fur et à mesure que le trottoir, les images cédaient, que les sculptures prenaient vie : un chien avalant un lion ; un iguane dévorant un paresseux. Dans les deux cas, l’objectif de ces artistes n’est pas simplement d’expérimenter une nouvelle technologie, mais d’amener le spectateur à réfléchir sur sa propre relation avec les dispositifs immersifs, qui génèrent une illusion de participation mais, en réalité, remettent à zéro toute forme de contrôle critique sur la réalité. L’expérience qui en résulte est un vertige psychophysique, une excitation perceptive qui s’avère profondément troublante. Ici, l’empathie n’est pas rassurante, mais un outil critique qui met à nu notre incapacité à agir. À une époque où le langage du jeu est de plus en plus normalisé et adopté dans la culture visuelle, ces œuvres dénoncent la perte d’une perspective historique : elles nous montrent une réalité dépourvue de profondeur temporelle, où il n’est plus possible d’imaginer les conséquences collectives de nos actions. C’est pourquoi je suis attirée par les nouvelles générations qui relèvent ce défi et se lancent dans ce type de recherche.
Les artistes dont vous parlez et qui pourraient vous intéresser dans les années à venir, c’est parce que...
... parce qu’ils pourraient nous aider à réapprendre à porter un regard impliqué sur un monde saturé d’images. Aujourd’hui, nous sommes immergés dans un excès d’autoreprésentation - selfies, histoires, Zoom fatigue - qui alimente un sentiment illusoire de présence, mais génère en réalité une exposition au vide. Ce vertige visuel est une question de plus en plus urgente, notamment avec la normalisation des archives numériques auxquelles nous confions toute notre mémoire, mais aussi avec l’arrivée de nouveaux systèmes informatiques capables de traiter en temps réel des masses de données aussi considérables. C’est la raison pour laquelle le ChatGPT s’est répandu en si peu de temps que nous l’utilisons comme un moteur de recherche plus créatif et plus intuitif. Là encore, nous sommes aidés par des œuvres du passé récent, comme les deux vidéos qui ont assumé et critiqué l’esthétique du tutoriel, à savoir Grosse Fatigue de 2013 de Camille Henrot - avec laquelle elle a remporté le Lion d’or à la Biennale de Venise cette année-là - et Being Invisible Can Be Deadly (également de 2013) de Hito Steyerl. Dans le premier cas, nous étions confrontés à l’histoire de l’humanité racontée en 13 minutes à travers un montage frénétique d’images se déplaçant sur un bureau rempli de fenêtres superposées provenant de diverses archives numériques, dont celle du Smithsonian Museum. Dans la seconde, l’artiste construit un montage stratifié et troublant, mêlant vidéos d’archives, reconstitutions simulées et voix off pour réfléchir à la relation entre le fait d’être visible et le fait d’être regardé. L’art, dans ces cas, ne cherche plus à rendre visible l’invisible, mais à démanteler la logique même du visible. L’empathie qui en découle n’est ni linéaire, ni rassurante, mais dérangeante. Ce sont ces défis qu’il m’intéresse d’observer chez les nouvelles générations d’artistes. C’est le même défi qui a conduit Rebecca Moccia à représenter l’Italie en 2024 avec le projet Ministries of Loneliness - l’installation multicanal et les thermographies tactiles de Cold as You Are - à la 15e Biennale de Gwangju. Ou encore Elena Mazzi qui, dès 2015, lors de la 14e Biennale d’Istanbul, a créé un projet spécifique au site avec lequel elle a anticipé de nombreuses urgences contemporaines liées à la mémoire écologique et à la mobilité de la connaissance. Tout comme Kamilia Kard et Caterina Biocca, bien que de manière différente, étudient les implications d’une interaction émotionnelle entre l’humain et le numérique. Tout comme Irene Fenara ou Ambra Castagnetti nous font réfléchir à l’impact des nouvelles technologies sur la façon dont nous nous sentons regardés. Tous ces artistes ne se contentent pas d’utiliser les nouveaux médias, mais s’interrogent sur la capacité de l’art, de la culture et de la créativité à transformer la manière dont nous vivons le temps, la mémoire et l’espace collectif.
Votre intérêt n’est donc pas lié à leur utilisation des nouvelles technologies ?
Non, ce n’est pas l’utilisation des technologies en soi qui m’attire. C’était une clé de lecture typique de la transition entre les années 1990 et 2000, héritée des premières expériences vidéo des années 1960, à partir de Nam June Paik, et liée à la tension qui émergeait dans la transition entre l’analogique et le numérique. Aujourd’hui, cependant, ce qui devrait nous intéresser, c’est “comment” certains artistes - également de la nouvelle génération - réfléchissent de manière critique à l’impact cognitif et culturel des technologies dans la vie de tous les jours. Leurs œuvres ne se contentent pas de présenter le numérique, mais nous y plongent comme dans une nouvelle condition existentielle. En d’autres termes, elles ne se contentent pas de donner corps et substance à ce que Luciano Floridi a défini en 2016 comme l’“infosphère” : un environnement dans lequel les faits coexistent avec leurs traces sur le web, mêlant le présent et le passé dans un même état et faisant en sorte que le concept de vérité se substitue à celui de plausibilité. C’est cette nouvelle lecture de la réalité qui doit nous aider à prendre conscience que les paradigmes de jugement sur le monde et l’art ont changé. Par exemple, nous sommes tous tombés dans le même jugement hâtif lorsque, après la pandémie, il y a eu un retour prépondérant de la peinture figurative au niveau international, l’attribuant uniquement à la nécessité pour le marché de créer un mouvement de la demande. Au contraire, un examen plus approfondi des peintures de Sasha Gordon, Wang Yuyang, Kerstin Brätsch, Jadé Fadojutimi, Moka Lee, Flora Yukhnovich, Remus Grecu, Dhewadi Hadjab, Alioune Diagne, Farah Atassi, Anna Weyant, Richard Colman, Burna Boy et Louis Fratino montre qu’elles ont toutes en commun - en dépit de leurs caractéristiques esthétiques, techniques et militantes - d’être des œuvres d’art et des œuvres d’art. malgré leurs différences esthétiques , techniques et militantes - par un voile analytique, une approche hospitalière et froide produite par l’influence de l’image numérique en général dans laquelle ces artistes sont nés. En particulier, ils ont été influencés par une nouvelle esthétique du jeu très répandue dans la perception du temps et de la durée des images en général. Le seul à avoir parlé de ce nouveau paradigme, sans craindre d’être mal compris, est Hans Ulrich Obrist, qui a discuté de l’influence des jeux vidéo sur l’art contemporain dans divers contextes depuis 2021, ce qui l’a amené à être le commissaire de l’exposition Worldbuilding : Gaming and Art in the Digital Age (2022-2023), à la Julia Stoschek Collection à Berlin. Cela dit, je m’intéresse davantage aux artistes qui cherchent et chercheront à éliminer la distance entre l’art et la vie (à l’époque de l’infosphère) afin de nous faire réfléchir non pas à la manière dont nous représentons, mais plutôt à la manière dont nous pratiquons notre vie quotidienne numérique. En ce sens, je vois une profonde continuité avec les pratiques relationnelles et de post-production des années 1990, mais qui doivent nécessairement être relues aujourd’hui à la lumière des logiques immersives, fragmentaires et hypermédiatiques du présent.
Pouvez-vous mieux expliquer cette référence au passé et à l’art relationnel des années 1990 que vous remettez en cause pour mieux comprendre le paysage artistique actuel ?
C’est là que le rôle du critique, différent de celui du commissaire d’exposition, entre en jeu dans la lecture du présent. L’esthétique relationnelle des années 1990 et 2000 (avec des artistes comme Rirkrit Tiravanija, Thomas Hirschhorn, Mario Airò, Maurizio Cattelan, Cai Guo-Qiang, Surasi Kusolwong, et plus tard Wolfgang Tillmans, Pawel Althamer, Elisabetta Benassi, Koo Jeong A, Tino Sehgal et d’autres) a anticipé le besoin de la société de devenir un protagoniste actif et engagé. Mais à partir de 2012, avec la diffusion de l’économie de partage et des médias sociaux, cette participation a pris de nouvelles coordonnées. Ces outils numériques semblaient démocratiser l’interaction, mais en réalité ils ont alimenté une nouvelle phase du capitalisme basée sur la dématérialisation des produits en les transformant en services et en nous amenant au seuil d’une nouvelle économie de l’attention. Les artistes actifs dans cette période nous montrent que la simple participation ne suffit plus, il faut de la responsabilité. Leur travail met à nu les ambiguïtés d’une immersion continue dans des flux de données que nous produisons souvent nous-mêmes. Ce sont ces pratiques qui nous font relire d’un œil nouveau les œuvres d’il y a trente ans et le sens plus large de l’engagement artistique. Aujourd’hui, l’art ne peut plus être seulement un miroir critique, mais un dispositif expérientiel capable de générer des prises de conscience, des croisements et des alliances. C’est là que se joue le véritable espace de l’empathie et c’est sur ce terrain que se mesurera la prochaine génération artistique.
C’est dans les années 1990 que vous avez commencé à vous intéresser à l’art contemporain : pouvez-vous nous dire comment cela s’est produit ?
Oui, j’ai commencé à m’intéresser à l’art très tôt, peut-être même trop tôt, car j’étais en dernière année de lycée lorsqu’en 1996 j’ai participé à l’organisation de la première édition de Tuscia Electa, sous la direction de Fabio Cavallucci. Il s’agissait d’un projet très ambitieux puisqu’il consistait à inviter des artistes internationaux résidant en Toscane, de Jannis Kounellis à Joseph Kosuth, de Jim Dine à Betty Woodman, de Luigi Mainolfi à Gio Pomodoro, à réaliser des interventions spécifiques dans des lieux publics du Chianti, tels que des églises paroissiales romanes, des villages, des places ou des villas de la Renaissance. La même année, Arte all’Arte, promu par Galleria Continua, a fait ses débuts dans la région du Chianti, à Sienne, avec la même stratégie. C’était l’époque où nous quittions les lieux d’art consacrés pour dialoguer avec la vie quotidienne et élargir le débat public. Ma tâche consistait à suivre les artistes dans la phase de conception et d’installation et, pour rendre les œuvres accessibles à un public non spécialisé, j’ai également inventé un système d’autoguidage. C’est là que j’ai compris comment l’art pouvait être un outil pour activer un véritable dialogue avec les gens et les lieux, sans barrières ni filtres. Les années suivantes, j’ai continué à collaborer avec Tuscia Electa, qui s’est étendue à d’autres municipalités que Greve in Chianti, et en 2000, j’ai commencé à collaborer avec Pier Luigi Tazzi. Parallèlement, j’ai étudié à l’université de Sienne avec Enrico Crispolti et j’ai commencé à travailler avec le collectif Base / Progetti per l’arte à Florence, qui a ouvert ses portes en 1998 en face de la librairie City Lights. Aujourd’hui encore, les activités de Base ne sont pas signées par un seul auteur mais, par accord, par l’ensemble du collectif, qui est composé - c’est sa particularité par rapport à d’autres espaces de ce type - d’artistes de différentes générations et qui utilisent des langages expressifs différents, mais qui trouvent un point de contact dans l’action pratique consistant à inviter d’autres artistes à exposer dans la ville et à élargir les thèmes du débat sur le rôle de l’art. Ce que j’ai appris de Base - et ce que j’ai rendu au projet en essayant de le coordonner du mieux que j’ai pu au cours de ces vingt années - c’est l’idée d’un “commissariat collectif”. J’ai pu développer ces réflexions à un moment où la conservation, au tournant des années 2000, changeait rapidement de rôle. En fait, l’idée de l’exposition thématique en tant qu’outil permettant de dépasser les limites des langages et techniques artistiques traditionnels s’était imposée, offrant à l’art la possibilité de se confronter à la nouvelle modernité liquide et à une réalité globale et interconnectée, désormais concrétisée par la diffusion de l’internet. L’artiste de cette époque cherche de plus en plus - en réponse à la diffusion d’images autoproduites par tout un chacun - à produire des événements minimaux et anti-photogéniques qui parviennent à élever le niveau d’attention du public dans sa pratique de la vie quotidienne. C’est le mode adopté par ces artistes pour créer un nouveau type d’art politique, ou plutôt engagé, visant à modifier les paramètres occidentaux-centrés, colonialistes et patriarcaux du siècle précédent. La Biennale de Venise de 2001, organisée par Harald Szeemann et intitulée Open, et la Documenta 11 de 2002, dirigée par Okwui Enwezor, ont témoigné de cette nouvelle trajectoire post-colonialiste et inclusive et l’ont légitimée au niveau institutionnel.
Comment avez-vous réagi à tout cela ?
J’ai essayé de lancer des projets qui contribueraient à mettre en lumière ce changement. Dans les années qui ont suivi, les nouvelles générations ont repensé ce type d’activisme, non seulement en voulant améliorer le monde, mais en s’attachant à repenser la manière de construire un nouveau sentiment d’appartenance et d’identité collective. C’est à cette époque que s’est développée une forte réflexion sur la réactivation de la mémoire collective. C’était une façon de travailler sur les monuments traditionnels - ceux qui étaient sur des piédestaux - mais immatériels et non imposants. Les artistes avec lesquels j’ai travaillé ces années-là, comme Anri Sala, Stefania Galegati, Jonathan Monk, Rossella Biscotti, Diego Perrone, Marinella Senatore, Joanna Billing, Elisabetta Benassi, Roman Ondák, Matteo Rubbi, agissaient sur ce thème du point de vue du contenu. D’un point de vue formel, tous ces artistes avaient en commun d’utiliser n’importe quel matériau et n’importe quelle technique parce qu’ils les choisissaient en fonction du projet spécifique qu’ils devaient réaliser. Prendre en compte, de leur côté, le contexte dans lequel l’œuvre a été créée et qu’elle va habiter était une manière de réagir à la mondialisation et à la perte de références physiques. À l’époque de Google Maps, le monde commençait à devenir extrêmement grand, mais aussi extrêmement petit. Vers la fin des années 1910, on assiste alors à un autre changement de la part de ces artistes, ou plutôt à une émergence plus claire de ce qui les intéresse. Il s’agit du travail sur la perception du temps. Il ne s’agissait pas seulement d’une approche spécifique à un site, mais de plus en plus d’une approche spécifique au temps, liée à l’époque et aux conditions culturelles et politiques du moment. Aujourd’hui, cette dimension s’est à nouveau transformée. Comme je l’ai dit dans mes réponses précédentes, nous sommes dans un écosystème numérique qui façonne notre perception du présent. Je crois que c’est précisément cette attention à l’ici et au maintenant, à l’expérience quotidienne et à la responsabilité de ceux qui regardent et agissent, qui est le fil rouge qui relie toutes les pratiques artistiques qui m’ont toujours intéressée, depuis celles des années 1990 jusqu’à celles de la génération actuelle, confrontée aux logiques fragmentaires, relationnelles et hypermédiatiques de l’infosphère contemporaine.
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