Nomellini et la ville agitée : comment Gênes a enflammé le symbolisme italien. Comment l'exposition


À Gênes, le Palazzo Nicolosio Lomellini accueille une exposition sur la période génoise de Plinio Nomellini. Ici, la ville a forgé non seulement un nouvel artiste, une voix lyrique et moderne dans la peinture européenne, mais aussi un moment fondamental dans l'art de l'époque. Voici comment se présente l'exposition : le compte-rendu de Federico Giannini.

L’histoire du pointillisme italien passe par Gênes. C’est à Gênes que passent les troubles sociaux qui se répercuteront plus tard dans les arts. Les premiers foyers symbolistes qui ont animé la peinture italienne à la fin du XIXe siècle sont passés par Gênes. Plinio Nomellini, arrivé en Ligurie au printemps 1890 et reparti douze ans plus tard pour la Versilia, en est le centre. Il était arrivé à Gênes peut-être avec l’idée de rester peu de temps (nous le savons grâce à une lettre qu’il a écrite), pour des raisons de circonstances : l’exposition XXVIII Promotrice, la possibilité d’étudier un paysage différent de celui de sa Toscane, et probablement aussi les suggestions de l’un de ses maîtres, Telemaco Signorini, un habitué de la côte ligure, de la Riviera di Levante, des Cinque Terre, de Riomaggiore. Et puis, poussé par l’envie d’“essayer de nouvelles choses”, non seulement il a l’intention de rester longtemps, mais il décide d’appeler ici beaucoup de ses amis toscans, si bien que l’année suivante, il faut l’imaginer marchant le long des falaises avec Giorgio Kienerk et Angelo Torchi pour tenter ses premières expériences pointillistes là où l’eau de la mer Ligure rencontre les profils abrupts des rochers surplombant la mer, au milieu des houles, parmi les caruggi des villages de la côte. Capturé par hasard à Gênes", aurait écrit Vittorio Pica dans Emporium , alors que Nomellini était au sommet de sa carrière, “il s’y installa, séduit par la beauté magnifique de cette ville, [...].contraint, pour joindre les deux bouts au pire et pouvoir supporter les dépenses pour les toiles, les couleurs et les cadres de ses nouveaux tableaux, de faire le portrait des marins anglais, français ou norvégiens qui passaient dans le port avec leurs navires marchands pendant de nombreuses heures de la journée et pour des prix dérisoires”.Les marins, qui se montraient habiles à saisir la ressemblance de leurs rudes physionomies, lui confiaient la tâche de reproduire leur apparence à l’aquarelle ou au pastel sur une carte, ajoutant ainsi quelques lires supplémentaires au tarif établi pour son propre portrait".

Cette prétendue activité de portraitiste infatigable se perd dans la légende : ce qui est certain, c’est que dès le début Nomellini était absorbé par certains de ses “projets artistiques flamboyants” qui allaient lui coûter labeur, difficultés, tribulations et même, comme nous le verrons, emprisonnement. L’exposition que le Palazzo Nicolosio Lomellini consacre au Nomellini des années génoises(Plinio Nomellini a Genova, tra modernità e simbolismo), la première exposition monographique sur Nomellini après celle qui s’est tenue à Seravezza en 2017 et la première entièrement dédiée à cette période de sa carrière, s’est fixé pour objectif d’enquêter sur tous les projets flamboyants du peintre livournais, un par un. Et les deux commissaires, Agnese Marengo et Maurizio Romanengo, ainsi que le grand comité scientifique, ont regardé cette phase de la production de Nomellini comme on regarde une cellule au microscope, et il est apparu que Gênes a été un moment crucial. Décisif. Non seulement pour Nomellini, mais pour toute la culture italienne du début du siècle. La ville qui avait d’abord attiré l’artiste pour la lumière et la mer était devenue une sorte de centre de la nouveauté, de tout ce qui est nouveau. Et apparemment, il y a encore beaucoup à dire sur Nomellini, sur le Nomellini génois : sur ses premiers voyages sur la côte avec Torchi, avec Kienerk, avec Ermenegildo Bois, ou sur cette “école d’Albaro” à laquelle on attribue la paternité du pointillisme. Sur son amitié avec Pellizza da Volpedo. Sur les premiers succès de Nomellini. Sur l’association fertile avec Edoardo de Albertis. Sur le cénacle de Sturla qui rassemblait dans les trattorias de la ville tant d’esprits parmi les plus raffinés de l’époque et qui allait devenir une flamme pour alimenter les braises du symbolisme italien. Sur son idée de l’art comme terrain de revendications sociales.

Et en effet, l’exposition (pas plus d’une cinquantaine d’œuvres, la plupart provenant de collections privées et de galeries commerciales) range découverte après découverte de documents inédits, tous présentés dans l’essai de Maria Flora Giubilei publié dans le catalogue. Les mérites de cette exposition vont cependant au-delà de la biographie de Nomellini, déjà assez bien établie : le visiteur qui décidera de suivre attentivement l’itinéraire de Marengo et Romanengo aura l’impression qu’il s’agit d’une exposition sur Gênes plutôt que sur Nomellini. Et sur Gênes en tant qu’agglomération scintillante et nerveuse d’une nouvelle modernité qui voyait dans le peintre venu de Livourne quelque chose de plus que son aedo. Nomellini, pourrait-on dire après avoir vu cette exposition, était un inventeur. Bien sûr : nous le savions déjà, nous n’avions pas besoin d’une autre exposition pour réaffirmer l’importance de sa production. Et son élan ne s’est pas arrêté à Gênes, car avec le déplacement en Versilia allait s’ouvrir la saison la plus mystérieuse, la plus lyrique, la plus d’Annunzio de son art : après la Ligurie, Nomellini avait encore beaucoup de choses à dire. Et pourtant, tant d’orientations de la culture italienne de l’époque sont passées par la fervente expérience génoise.

Mise en place de l'exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Plan de l’exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Mise en place de l'exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Préparation de l’exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Mise en place de l'exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Préparation de l’exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Mise en place de l'exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Préparation de l’exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Mise en place de l'exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini
Préparation de l’exposition Plinio Nomellini à Gênes. Entre modernité et symbolisme. Photo : Federico Giannini

Pour s’ouvrir à la nouveauté, Nomellini a dû commettre une “trahison”, comme l’écrivait Nadia Marchioni au moment de l’exposition il y a huit ans, par rapport aux enseignements de son maître Giovanni Fattori : il a abandonné le naturalisme à la Macchiai de sa première phase (un exemple en est donné par le tableau Al parco (Dans le parc), 1888, qui est directement comparé à une Strada di paese (Rue du village) de Giovanni Fattori), pour se tourner vers le symbolisme : Ce sont ces deux tableaux, ainsi qu’un Mémoire de Gênes placé hors contexte sur le mur d’entrée, qui ouvrent l’exposition). Ayant quitté Florence où il avait appris à peindre et où, aux tables de la trattoria Volturno, il s’était fait tous les amis qu’il amènerait plus tard à Gênes, Nomellini décida de s’installer en Ligurie pour se consacrer à l’étude de la mer, à l’étude de ce “ [...] mouvement continuel de l’eau [...] ”.mouvement continuel des [...] rives et du port“ qui, comme il l’avouera dans une lettre à Telemaco Signorini dès son arrivée dans la ville, lui avait fait bonne impression et l’avait incité à essayer ces ”choses nouvelles“ qu’il recherchait. Avant cette ”trahison", une phase d’expérimentation, de transition, avait bien sûr été nécessaire : Ainsi, Ricordo di Genova, tout en présentant déjà la peinture à la touche qui était au centre de ses recherches, porte encore le souvenir de l’approche des Fattori dans l’exposition “La peinture à la main”.Fattori dans les deux figures qui apparaissent assises sur le rivage, et avant cela, le Fienaiolo de 1888, le chef-d’œuvre de sa jeunesse, rappelle explicitement une Boscaiola du maître (à tel point que les deux œuvres sont aujourd’hui exposées côte à côte dans la grande exposition sur Fattori à la Villa Mimbelli de Livourne, sous le commissariat de Vincenzo Farinella). La recherche de Nomellini s’est nourrie de sa proximité avec la mer, et la première salle de l’exposition offre au visiteur la possibilité de se promener parmi les rochers et les carrugi avec le peintre et ses compagnons qui, comme lui, passaient leurs journées à peindre sur la côte génoise.

Ce qui a ému Nomellini, Kienerk, Torchi et même Pellizza (qui se trouvait également à Gênes en 1890 : la comparaison de leurs marines respectives, peintes ensemble au même endroit de la côte, dans la deuxième salle, est d’un grand impact), c’est leur intérêt pour la peinture française : d’abord pour les impressionnistes, et tout de suite après pour les pointillistes, pour ces “très humbles serviteurs de Pisarò, de Manet, etc. et enfin de M. Müller”, comme les avait appelés avec mépris Fattori, qui avaient pourtant réussi à obtenir une nouvelle lumière par la division de la couleur, en juxtaposant des touches de pigment pur, en travaillant sur des tons complémentaires, et en offrant aux divisionnistes italiens le prétexte à de nouvelles interprétations fiévreuses et brûlantes : Nomellini “expérimente alors”, écrivent les deux commissaires, “la division de la couleur en recherchant constamment la profondeur spatiale, rendue avec l’impétuosité des murs raccourcis, l’épaisseur atmosphérique et le mouvement des figures”. On le voit bien dans certaines œuvres de 1891 qui marquent le détachement définitif de l’enseignement du maître : on peut ainsi parler du Ricordo di Milano, où le coup de pinceau en touches sert à évoquer les tons fugaces de la mémoire, ou d’expériences comme Nell’orto où tout le jardin perd sa consistance et devient lumière et couleur. Même Telemaco Signorini, à ce stade de sa carrière, sensible aux suggestions qui lui parvenaient de France, avait essayé d’offrir au sujet les scintillements de lumière qui se posent sur les feuilles, sur les vagues de la mer, sur les murs de pierre sèche : l’un de ses derniers chefs-d’œuvre, Végétation ligure à Riomaggiore, est exposé à côté des œuvres de Nomellini et à côté d’un tableau d’Angelo Torchi, Dalla finestra (De la fenêtre), qui adopte une composition très similaire. L’un des résultats les plus mûrs et les plus fascinants de cette phase de la peinture de Nomellini est le Naufrage, un tableau dans lequel des bavures de blanc sont utilisées pour rendre l’effet de l’écume de mer, où le souffle du vent est rendu uniquement par le rythme et le mouvement des coups de pinceau.où l’on perçoit déjà quelques lueurs de cette “réflexion sociale”, comme s’intitule la section suivante de l’exposition, qui explosera quelques mois plus tard dans un certain nombre de tableaux visant tous à évoquer la condition des ouvriers d’usine à Gênes. La section suivante de l’exposition s’articule autour de l’une des œuvres les plus connues de Nomellini, La diana del lavoro, éclairée avec une efficacité extraordinaire, les lumières parvenant à faire ressortir, et ce n’est pas facile, la tridimensionnalité d’un tableau qui fait bondir les deux personnages du premier plan : Le mérite de l’exposition, cependant, n’est pas tant d’avoir disposé le tableau dans les conditions d’éclairage les plus appropriées pour saisir chaque touche du pinceau, chaque passage de lumière, chaque éclat qui se pose sur la peau et le chapeau de l’ouvrier qui regarde devant lui, attendant le signal, la diane, pour commencer le travail de la journée. Il ne s’agit pas non plus d’insister sur la continuité de l’intérêt de Nomellini pour l’angoisse ouvrière : l’œuvre dédiée aux ouvriers des chantiers navals est comparée à un tableau de ses années toscanes, un groupe de paysans revenant du travail. Non : le principal mérite est d’avoir exposé La diana del lavoro avec un ensemble de témoignages sur le procès que Nomellini, accusé d’avoir participé aux activités subversives d’un groupe indéterminé d’anarchistes toscans, a dû affronter en 1894, un matériel rare à voir dans une exposition : des gravures qui rendent compte des conditions misérables de la prison de Sant’Andrea où Nomellini a été incarcéré pendant quelques mois, le portrait du poète Ceccciano, qui a été emprisonné pendant quelques mois, et des photos de l’homme qui a été emprisonné pendant quelques mois. le portrait du poète Ceccardo Roccatagliata Ceccardi qui, comme Nomellini, était animé par les mêmes idées de justice sociale, le dessin du procès de Telemaco Signorini qui, plus tard, sera décisif pour innocenter son jeune collègue, car son témoignage émouvant, combiné à l’absence de preuves, a permis à Nomellini d’obtenir une condamnation à mort. son témoignage émouvant, associé au travail inlassable de l’avocat Giovanni Rosadi qui a mis en place une défense basée sur l’extranéité totale du peintre à toute prétention de sédition, a probablement réussi à guider le jury qui a finalement accordé à Nomellini un acquittement complet (les mémoires de Signorini se concluent comme suit : “Je n’ai eu qu’une tâche, c’est d’adresser une prière, au nom de l’Académie de Florence, à la Cour, pour qu’elle rende à l’art l’un des plus beaux esprits, l’un des plus féconds travailleurs, un jeune homme destiné à un brillant avenir, et qui fera honneur non seulement à lui-même, mais aussi à son pays. Pour ma part, et celle de mes collègues, je n’ajouterai que ceci : nous sommes vieux et nous nous retirons ; puisse la Cour veiller à ce que les jeunes gens qui doivent nous succéder dans la voie de l’art ne soient pas étranglés par les barreaux de la prison”).

Giovanni Fattori, Village Street (vers 1885 ; huile sur toile, 25 x 38,5 cm ; collection privée)
Giovanni Fattori, Strada di paese (vers 1885 ; huile sur toile, 25 x 38,5 cm ; collection privée)
Plinio Nomellini, Souvenirs de Gênes (vers 1890 ; huile sur toile, 54 x 74 cm ; collection privée). En concession de Enrico Gallerie d'Arte
Plinio Nomellini, Souvenirs de Gênes (vers 1890 ; huile sur toile, 54 x 74 cm ; collection privée). En concession de Enrico Gallerie d’Arte
Plinio Nomellini, Nell'orto (vers 1891 ; huile sur toile, 29 x 39 cm ; collection privée). Par concession de la Galleria Arte Casa, Gênes.
Plinio Nomellini, Dans le potager (vers 1891 ; huile sur toile, 29 x 39 cm ; collection privée). En concession de la Galleria Arte Casa, Gênes
Plinio Nomellini, Souvenirs de Milan (1891 ; huile sur carton, 35 x 25,5 cm ; collection privée)
Plinio Nomellini, Souvenirs de Milan (1891 ; huile sur carton, 35 x 25,5 cm ; collection privée)
Telemaco Signorini, Vegetazione ligure a Riomaggiore (vers 1894 ; huile sur toile, 58,5 x 88,5 cm ; Gênes, Museo delle Raccolte Frugone)
Telemaco Signorini, Vegetazione ligure a Riomaggiore (vers 1894 ; huile sur toile, 58,5 x 88,5 cm ; Gênes, Museo delle Raccolte Frugone)
Plinio Nomellini, Mer de Gênes (Naufragio) (1891 ; huile sur toile, 70 x 81 cm ; collection privée). Par concession de la Galleria Arte Casa, Gênes.
Plinio Nomellini, Mer de Gênes (Naufragio) (1891 ; huile sur toile, 70 x 81 cm ; collection privée). Par concession de la Galleria Arte Casa, Gênes.
Plinio Nomellini, La diana del lavoro (1893 ; huile sur toile, 60 x 120 cm ; collection privée)
Plinio Nomellini, La diana del lavoro (1893 ; huile sur toile, 60 x 120 cm ; collection privée)
Telemaco Signorini, Le procès de Gênes (1er juin 1894 ; encre sur papier, 180 x 385 mm ; Milan, Collection privée)
Telemaco Signorini, Le procès de Gênes (1er juin 1894 ; encre sur papier, 180 x 385 mm ; Milan, collection privée)

La dureté de son emprisonnement suggère cependant à Nomellini une plus grande circonspection, si bien que sa production, à partir de cet été 1894, abandonne presque totalement la veine de la dénonciation sociale, qui resurgira pourtant de façon karstique quelques années plus tard (la lithographie de 1903 pour la revue Il lavoro en est l’exemple le plus lumineux). l’exemple le plus lumineux), et s’ouvrira au symbolisme qui avait mûri dans les cercles du cénacle de Sturla, la sodalité des artistes, des écrivains et des poètes qui s’étaient rassemblés autour du journaliste Ernesto Arbocò et qui se réunissaient autour de sa table (lorsqu’il pouvait recevoir tout le monde chez lui : plus tard, la référence deviendra la trattoria dei Mille à Sturla) discutaient d’art, de politique, de poésie, de lettres. Ils ont même imaginé leur propre “Trattoria del Falcone” imaginaire et conçu un cycle décoratif pour les murs du Palazzo Spinola Gambaro, Via Garibaldi, où ce groupe d’artistes avait réussi à obtenir un fonds, et dont ils ont vainement cherché la trace lors de la préparation de l’exposition au Palazzo Nicolosio Lomellini. Le parcours de l’exposition cherche ensuite à mettre en évidence la contribution d’Arbocò et du cénacle de Sturla au symbolisme italien, en la trouvant dans l’élaboration d’un paysage, et en particulier d’un paysage nocturne, plein d’allusions, d’idées, de mystère et d’autres significations. La nuit est la “ville de l’inconnu” de Ceccardo Roccatagliata Ceccardi, le “port révélé sur l’abîme de l’éther”, une présence familière et angoissante qui imprègne la ville lorsque le soleil se couche. C’est l’époque où toute l’Europe connaît la poétique de l’état d’esprit paysager, et manifestement, même Gênes n’est pas à l’abri de ce qui se développe sur le continent derrière les formulations du Journal Intime d’Amiel : Des peintures d’artistes tels que Federico Maragliano, Giuseppe Mazzei et Edoardo De Albertis défilent dans l’exposition, où la nuit génoise est froide et enveloppante, reconnaissable et insaisissable, énigmatique et lugubre, vide et pleine, grise comme la fumée de ses cheminées, parfois éclairée par une lumière qui devient presque porteuse d’espoir. Ce sont des nuits pleines de vie et des nuits sombres et silencieuses : Maragliano est présent avec une Sera grouillante dans une rue de Gênes et avec un Notturno (Nocturne ) où un clair de lune calme une creuza qui pénètre dans la végétation, et Nomellini s’attarde sur deux “ciccaioli”, les balayeurs qui nettoyaient les rues du centre de Gênes à la minute la nuit, et transcende la réalité avec Le lucciole (Les lucioles), une œuvre exposée à côté de l’Autunno (Automne) d’Edoardo De Albertis pour évoquer un diptyque,Autunno latino (Automne latin), qui réunissait le marbre du sculpteur génois et un paysage mystique de Nomellini, du même mysticisme que celui qui imprègne le tableau exposé au Palazzo Nicolosio Lomellini. “Il fallait aller jusqu’à arrêter dans la matière l’apparence incorporelle du rêve” : C’est cette intention qui poussa Nomellini à approfondir son amitié avec De Albertis après avoir vu, comme le reconstitue bien Giacomo Goslino dans le catalogue, une de ses œuvres, Élévation, à l’Exposition internationale de Turin de 1895, et c’est cette vision qui lui suggéra qu’il était opportun non seulement de faire l’éloge de son collègue un peu plus jeune dans la presse, mais aussi d’essayer de travailler avec lui. Dans les peintures qui ont vu le jour parallèlement aux sculptures de De Albertis, écrivait un érudit comme Gianfranco Bruno dans les années 1980, "l’imagination sombre de Von Stuck semble dissoute dans un lyrisme spirituel, et le ductus linéaire raffiné, de descendance klimtienne, est converti en une fantasmagorie du paysage". C’est Gênes qui voit in nuce, et alors déjà parfaitement accompli, le plus lyrique des Nomellini, celui de la saison de la Versilia et de Torre del Lago, celui proche de DAnnunzio, celui de la saison de la Versilia et de Torre del Lago, celui de la saison de la Versilia et de Torre del Lago.Annunzio, celui des pinèdes ardentes, des nymphes qui surgissent de l’écorce des arbres (sa merveilleuse Ninfa rossa, chef-d’œuvre de cette nouvelle phase toscane, est présentée dans l’exposition à côté des Lucciole pour suggérer cette continuité). C’est à Gênes que se produit le tournant symboliste, écrit Giuliano Matteucci à l’occasion de l’exposition de Nomellini au Palazzo della Permanente de Milan en 1985, “qui l’éloignera de plus en plus de la recherche strictement divisionniste, en supposant qu’il n’y a pas d’autre solution que de s’en tenir à l’art de la peinture”. de la recherche strictement divisionniste, en supposant qu’il ait jamais voulu que le divisionnisme soit plus qu’une technique innovante, utile pour renforcer l’efficacité communicative d’une image à laquelle il conférait déjà dans ces années une valeur éminemment sociale ou une profonde signification idéelle et poétique".

Après avoir passé en revue l’œuvre graphique de Nomellini (il y a la lithographie pour Lavoro, il y a la célèbre publicité pour l’huile Sasso, il y a l’encore plus célèbre Inno all’olivo que l’artiste a dessiné sur papier en 1901 pour illustrer le poème du même nom de Giovanni Pascoli : un Nomellini qui n’est pas moins expérimental que le Nomellini des peintures, un Nomellini qui, à sa manière, comme l’observe Veronica Bassini dans le catalogue, marque l’histoire de l’affiche par l’originalité de ses solutions formelles, la force de sa personnalité et l’efficacité communicative de ses images), l’adieu est confié à quelques peintures de paysage du début de la saison de la Versilia : À un peu plus de trente-cinq ans et au terme de son expérience ligure, Nomellini est un artiste complètement différent de celui qui est arrivé à Gênes, un Nomellini qui a définitivement abandonné les recherches du XIXe siècle encore liées au développement de l’héritage impressionniste et qui est entré dans le nouveau siècle avec une peinture débordante de poésie. La Versilia des couchers de soleil, les bois et les pinèdes, les rives du lac Massaciuccoli, les ciels salés deviennent les sujets de tableaux dans lesquels le paysage de la côte nord de la Toscane est transfiguré en poésie, en vision.

Federico Maragliano, Soirée dans une rue de Gênes (1898 ; huile sur toile, 86 x 67 cm ; collection privée). Par concession de la Galleria Arte Casa, Gênes.
Federico Maragliano, Soirée dans une rue de Gênes (1898 ; huile sur toile, 86 x 67 cm ; collection privée). Par concession de la Galleria Arte Casa, Gênes.
Federico Maragliano, Nocturne (vers 1901-1902 ; huile sur toile, 77 x 104,5 cm ; collection privée)
Federico Maragliano, Nocturne (vers 1901-1902 ; huile sur toile, 77 x 104,5 cm ; collection privée). En concession de la Galleria Arte Casa, Gênes
Plinio Nomellini, I trovatori (Les troubadours) (vers 1895 ; aquarelle sur papier, 34 x 29 cm ; Collection privée)
Plinio Nomellini, I trovatori (Les découvreurs) (vers 1895 ; aquarelle sur papier, 34 x 29 cm ; collection privée). En concession de la Galleria Arte Casa, Gênes
Plinio Nomellini, Le lucciole (1899 ; huile sur toile, 85 x 35 cm ; collection privée). Par concession de la Galleria Arte Casa, Gênes.
Plinio Nomellini, Le lucciole (1899 ; huile sur toile, 85 x 35 cm ; collection privée). En concession de la Galleria Arte Casa, Gênes
Plinio Nomellini, Nymphe rouge (1905 ; huile sur toile, 101 x 84 cm ; collection privée)
Plinio Nomellini, Ninfa rossa (1905 ; huile sur toile, 101 x 84 cm ; collection privée)
Plinio Nomellini, Meriggio infuocato (vers 1901-1903 ; huile sur toile, 105 x 105 cm ; Gênes, Chambre de commerce)
Plinio Nomellini, Après-midi brûlant (v. 1901-1903 ; huile sur toile, 105 x 105 cm ; Gênes, Chambre de commerce)

Il convient de noter qu’une partie du “tournant symboliste” de Nomellini, comme l’a appelé Matteucci, n’aurait peut-être pas été possible sans l’expérience de La Riviera Ligure, cette revue qui avait commencé comme bulletin d’information de Sasso et qui, financée, soutenue et promue de manière adéquate par la société, serait devenue une somme d’argent considérable pour l’industrie.serait devenue une somme des meilleures intelligences artistiques et littéraires de l’époque, puisque Pascoli, Campana, Gozzano, Govoni, Moretti, Pirandello, Ungaretti, Capuana, Rebora, Saba, le même Arbocò et Roccatagliata Ceccardi, et elle sera illustrée par Nomellini, De Pisis, Kienerk, De Albertis, Carena et beaucoup d’autres, réunis sous la direction lumineuse de Mario Novaro, qui en avait fait une sorte de catalogue périodique de l’industrie de l’huile d’olive ligure (qui offrait tout au plus, dans ses premiers numéros, à côté des fiches de produits et des listes de prix, quelques recettes à faire avec l’huile et quelques articles sur le paysage de la Ligurie : malgré la simplicité de la publication, il faut reconnaître à l’entreprise l’intuition immédiate de vouloir réaliser une publication sur le territoire qui soit en avance sur son temps) dans une revue qui, sans jamais perdre son caractère promotionnel, s’était hissée au sommet de la production littéraire nationale. Devant ces pages, et au-dessus de ces pages, Nomellini a eu l’occasion d’apprendre, de se confronter, d’élaborer des idées, des nouveautés, des suggestions, d’accorder son art aux rythmes de la poésie de Pascoli, de Roccatagliata Cccardi, d’autres qui ont animé La Riviera Ligure , en la transformant en une voix de la vision artistico-littéraire la plus actuelle de ces années-là. Dans l’exposition, le rôle de la revue est évoqué dans le bref passage consacré au graphisme.

En voyant les résultats de ce séjour qui commença et se termina parmi les falaises de la côte ligure, examinés d’abord avec l’œil du scientifique attentif au mélange des couleurs et au fracas de la lumière sur les falaises, puis avec l’âme du prêtre païen qui transfigura ces mêmes plages, ces mêmes criques, cette même étendue d’eau en une vision mystique, on est amené à penser que pour Nomellini il n’y avait probablement pas de différence entre l’art et la poésie. “Après les longues expériences sur les pratiques de l’art, écrira-t-il dans une de ses notes biographiques, lorsque j’arrive devant une toile vierge, je veux dire comme par magie, ma main se déplace librement pour des représentations qui clignotent dans mon esprit [...]. Pour cette vague de chant qui m’enveloppe fadement, voici le mythe qui se lève ancien et nouveau... en lui se lève le magicien”.


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